Descendre dans la soufflerie

Posté par Nico dans Voir - 7 septembre 2016 15:07

Sur la crête,
attendre que le soleil devienne orange et aveuglant. Les ombres sont gigantesques, et chaque vallonnement prend un relief démesuré.
Là, il est temps de se dire qu'il faudra trouver où planter la tente.
Le vent forcit. Je ne dormirai pas dans le col.
Je traverse le massif de bouleaux. Leur pâleur est accentuée par les rais du soleil bas. Ils sont diaphanes, presque transparents.
Sorti de ce bois (les ombres et les bruits de cette solitude - après vingt heures, on est toujours seul - deviennent angoissants), je m'avance vers un renflement de la colline, aperçu avant de descendre. Le lieu est tel que je l'imaginais, saillant, promontoire élancé au-dessus d'un hameau.
Je dresse la tente puis dîne, puis profite de l'embrasement ultime du ciel.
Alors, par vagues, j'entends le vent qui jamais ne m'effleurera (étrangement).
Tout autour de la tente, il montera des gorges, s'élevant des ruisseaux, grondant depuis les vallées.
J'entends toute la nuit des ruades, des rengorgements, des roulements, des courses tout autour de moi. Le vent, ce rien, prend son élan, j'entends un mugissement qui va croissant, puis les feuilles des arbres, dans les bosquets alentours, se mettent à trembler. Alors c’est un déferlement qui va croissant, et dure plusieurs minutes. Un cri, une parade, un déversoir, le rugissement d'une armée à la charge. Tout est secoué, tremble, grogne, grince, s'épuise et s’époumone.

Les arbres et les torrents deviennent ces populations brisées incapables de fuir les massacres, les épidémies.
Et le vent passe sans ménagement.
Mais quand même, il hoquette, il trébuche, il s'essouffle et s'effrange, s'éloigne, et avec lui, les images rageuses.
Alors silence.
Et ciel où glissent des étoiles.
Tout est tellement calme.

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